Aujourd’hui le 22 septembre 2025
J’aime sortir des sentiers battus, parfois, pour aborder d’autres sujet de nature économique. Pendant que je faisais des travaux autour de la maison ce weekend, j’ai pensé à celui-ci. Ça doit être à cause des Jeux Olympiques qui s’en viennent cet hiver.
L’or et le champagne : deux miroirs de notre époque?
Pour se mettre dans l’esprit :
Heart of Gold – Neil Young https://www.youtube.com/watch?v=c7eB7Wns1-M
Champagne Showers – LMFAO https://www.youtube.com/watch?v=UA8rcLvS1BY
Donc voilà… deux nouvelles en apparence éloignées se rejoignent cette semaine pour illustrer, chacune à leur manière, notre rapport à l’argent et au coût de la vie. Ma conclusion? Notre époque illustre un paradoxe où d’un côté l’incertitude économique grandit et on cherche la sécurité dans l’or… et de l’autre côté on se permet de moins en moins la frivolité du champagne. Certes on consomme moins d’alcool, toute sorte confondue – les chiffres mondiaux le montrent (et ceux de la SAQ aussi), mais je pense que le budget y est aussi pour quelque chose. Du moins, pour le champagne je pense, si je regarde à travers mes lentilles de finance et d’économie.
Ma pensée… plus élaborée. D’abord, l’or, le GOLD, le métal jaune a franchi un record historique de 3 760 $ US l’once aujourd’hui. En fait il a franchi des records presque à tous les jours/semaines depuis 5 ans. En 2019, il valait moins de 1 500 $ : une progression de plus de 200 % en cinq ans. Ce n’est pas anodin car dans un contexte d’inflation persistante, de tensions géopolitiques et de volatilité boursière, l’or demeure la valeur refuge par excellence. C’est une assurance contre l’incertitude, un moyen de protéger ce que l’on possède plutôt que de rechercher des gains hypothétiques (spéculatif?).
Pour mettre les choses en perspective, en 2019, l’indice S&P 500 se situait à moins de 3 000 points. Il atteint aujourd’hui près de 6 700 points, soit une hausse de plus de 156 %. Dans le même temps, l’or est passé de 1 500 $ à 3 760 $ l’once, une augmentation de 200 %. Autrement dit, depuis 2019, un dollar investi dans l’or a offert un meilleur rendement qu’un dollar placé dans l’indice phare de la bourse américaine, qui lui-même pousse les records en record en record. Une rare séquence où la valeur refuge surpasse le marché des actions.
Selon les données de la Fed de St-Louis, le pouvoir d’achat du dollar américain a chuté de plus de 70 % depuis 1980 – même plus de 90% si je recule à la fin de la 2e Guerre Mondiale. Concrètement, ce qu’on pouvait acheter avec 100 $ il y a 40 ans nécessite aujourd’hui plus de 300$. Ou encore, avec 100$ aujourd’hui, on ne peut plus acheter 70% des choses qu’on pouvait se procurer avant. En gros, tu ne vas plus très loin avec 100$ aujourd’hui… L’or, lui, a suivi la trajectoire inverse ; il s’est apprécié, protégeant ainsi contre cette dépréciation monétaire. Bref, la valeur de l’or augmente tandis que la valeur du dollar (américain, canadien, euro) s’effrite à chaque année ou l’inflation passe.
La comparaison avec l’immobilier en dit encore plus long. En 1981, une maison moyenne aux États-Unis coûtait environ à peine 60 000 $. Au prix de l’époque (environ 350 $ l’once), il fallait 170 onces d’or pour acheter une maison. En 2025, une maison moyenne vaut autour de 600 000 $. Au prix actuel (3 760 $ l’once), il faut environ 159 onces d’or. En d’autres termes, en plus de quarante ans, le prix des maisons a été multiplié par 10x en dollars… mais exprimé en or, il resté essentiellement le même à quelques onces près. L’or n’est donc pas seulement un actif de refuge : c’est aussi une unité de mesure de la valeur réelle à travers le temps. Évidemment tout cela n’est pas statique, parfois c’est plus, parfois c’est moins. Dans la folie immobilière aux États-Unis, il fallait plus de 700 onces d’or pour acheter une maison! Le marché était en pleine ébullition et on s’est ce qui s’est passé par la suite… Actuellement c’est le contraire- on pourrait même se poser la question si l’or n’est pas « trop cher » ou qu’un (autre!) boom immobilier et sur le bord de se produire.
Enfin, quand je pense à l’or…. pas étonnant qu’on associe ce métal aux Jeux olympiques : remporter l’or, c’est atteindre le sommet… et la tradition veut qu’on célèbre ensuite avec du… CHAMPAGNE!!!
Sauf que le champagne, lui, perd de son éclat. En 2023, les ventes mondiales ont reculé de 8 %, avec plus de 20 millions de bouteilles en moins expédiées depuis la France. En 2024, la tendance s’est accentuée : consommation en baisse de 7,2 % en France et de 10,8 % à l’exportation. Pendant ce temps, prosecco et cava – deux à trois fois moins chers – gagnent du terrain. Résultat : plus d’un milliard de bouteilles dorment en réserve, soit l’équivalent de près de cinq années de ventes.
Ce recul illustre parfaitement le concept d’élasticité de la demande. Pour les biens essentiels (pain, riz, électricité), la demande est inélastique : même si les prix augmentent, la consommation reste stable. Pour les biens de luxe comme le champagne, la demande est élastique : lorsque le coût de la vie augmente, la consommation chute rapidement, surtout en présence de substituts abordables. On peut penser à d’autre marchés de substitut comme le beurre et la margarine, ou du coté des protéine le bœuf, le porc et le poulet. Si le bœuf est trop cher, peut-être que le consommateur se tournera vers autre chose?
Quand les revenus disponibles se contractent et que le coût de la vie augmente, les consommateurs sabrent d’abord… dans les dépenses discrétionnaires comme le champagne, surtout s’il existe un produit similaire à meilleur prix.
Voici le comparatif Champagne vs Prosecco (2015–2024) en volumes mondiaux. On y voit le contraste : le champagne stagne puis recule après 2022 (On voit bien le creux marqué en 2020 lors de la pandémie, puis le rebond en 2021-2022 quand on a eu le droit de (re)faire le party, puis le net recul depuis 2023.. Le prosecco, lui, progresse presque chaque année et dépasse largement le champagne en volume.
En somme, notre époque illustre un paradoxe limpide : plus l’incertitude économique grandit, plus on cherche la sécurité dans l’or… et moins on se permet la frivolité du champagne.
SIMON BRIERE
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