Nouvelles Philip Shaw

Des cratères partout, un parcours difficile pour les prix des grains

22 mai 2020, Philip Shaw

J’ai l’impression que j’ai gelé à mort tout au long du printemps. Bien sûr, j’exagère un peu, alors que le sud-ouest de l’Ontario a souffert d’une vague de froid tout comme l’ensemble du grand Midwest américain. La semaine dernière, je me suis réveillé avec l’impression de ce que je croyais être de la pluie au cours de la nuit, pour découvrir ensuite un couvert d’un pouce de neige, quelque chose qui n’était jamais survenu pour un 10 mai dans cette région du pays. Pas besoin de le dire, Toronto et Ottawa ont enregistré leurs températures les plus froides pour un 10 mai.

J’ai fini de semer mon maïs le 6 mai alors que plusieurs agronomes dans la province conseillaient aux producteurs de ralentir un peu. De la pluie et du temps frais étaient dans les prévisions, et dans ces climats plus nordiques, ce n’est jamais une bonne prescription. Je ne suis toujours pas un grand amateur de semer du soya trop tôt. Je suis très satisfait que mon soya ne soit pas planté déjà. Personne ne connaît le futur, ça c’est certain, mais la mémoire d’avoir semé du soya l’an dernier au 25 juin reste vive dans ma mémoire. C’est encore tôt.

Avec tout ça en arrière-plan, le USDA nous a graciés de son rapport mensuel d’offre et demande (WASDE) le 12 mai dernier. Je sais que je m’attendais à des chiffres apocalyptiques dans le maïs, et ce n’est pas loin de ce que nous aura donné le USDA. Pour la saison à venir (2020-21) le USDA a annoncé qu’il prévoyait un record de production de 15,995 milliards de boisseaux pour le maïs aux États-Unis basé sur 97 millions d’acres et un rendement estimé à 178 boisseaux à l’acre. Ouf! Mon Dieu, ces chiffres sont de gros chiffres que, je crois, tout le monde s’attendait à avoir. Il semble que l’offre n’est jamais un problème lorsqu’on parle du maïs. Nous avons construit une économie pour le maïs qui est basé sur une génétique de maïs de plus en plus imperméable dans l’arène de la production. Le malheureux mauvais timing avec la destruction de la demande par le Covid rend ses chiffres tellement plus gros que ce que nous avons été habitué jusqu’ici.

La demande du côté de l’éthanol reste élevée à mon point de vue à 5,2 milliards de boisseaux. Il s’agit d’une baisse d’environ 178 millions de boisseaux par rapport à l’an dernier, mais je crois que nous savons tous de quoi je parle. J’ai entendu des analystes parler d’une réduction de la moitié de la demande d’éthanol basé sur la chute de demande d’essence. Alors que le temps passe, les cratères risquent d’être plus importants sur notre parcours selon ce que dira et quand il le fera le USDA au sujet de la demande d’éthanol. Combien de cette demande a été perdu et pour combien de temps?

Je cultive en fait plus de maïs que l’an dernier. C’est surtout pour des raisons de rotation des cultures puisqu’en 2019 je n’avais aucun blé et beaucoup trop de soya après ne pas avoir été en mesure de semer tout mon maïs prévu. Cependant, à regarder les fondamentaux dans le maïs, j’y repenserais à deux fois si c’était l’an dernier. Cependant, garder en tête, malgré ces sombres perspectives, personne ne connaît le futur. C’est toujours plus inquiétant avant l’aube. Ceci dit, je m’attends à ce qu’il se cultive 2,1 millions d’acres en maïs cette année.


Le soya n’a pas des fondamentaux négatifs par comparaison au maïs. Au 12 mai, le USDA estimait la récolte 2020-21 de soya à 4,125 milliards de boisseaux basé sur des superficies en soya de 83,5 millions d’acres et un rendement de 49,8 boisseaux à l’acre. Les inventaires de la nouvelle récolte sont évalués à 405 millions de boisseaux, ce qui est sous les attentes. Cependant, le USDA estime les inventaires de l’ancienne récolte à 580 millions de boisseaux, en hausse de 100 millions de boisseaux par rapport au mois dernier. Le USDA prévoit une récolte pour le Brésil de 124 millions de tonnes, ce qui représente un léger recul par rapport au mois dernier, mais reste un record. La production de l’Argentine est prévue à 51 millions de tonnes. Au moment d’écrire tout ceci, le contrat à terme du maïs à Chicago est à 3,31 $US/bo. sur décembre, le contrat à terme du soya à 8,43 $US/bo. sur novembre, rien d’extraordinaire.

Venu de nulle part dans la dernière semaine, le complexe du soya a reçu un coup bas que je n’avais pas prévu. Le Président Trump a suggéré d’annuler l’entente Phase 1 avec la Chine en raison de son rôle dans la débâcle du COVID-19. Ce signal du Président aura été suffisant pour créer un vide à la baisse dans le marché au moment qu’est sortie la nouvelle. Il n’y a rien de positif (« bullish ») à propos de ça, et la capacité de nous faire reculer davantage en arrière de quelques années, en dehors des problèmes du COVID-19 qu’on a présentement.

Le USDA a prévu la récolte totale de blé américain en baisse de 2020 à 2019. Les stocks mondiaux de la nouvelle récolte sont prévus en hausse, confirmant le fait que le blé est cultivé partout et que l’offre ne fera apparemment jamais défaut. Mon blé paraît bien, mais a été écrasé par la neige et un gel important, ce qui n’est pas bon selon mon ami agronome. Cependant, pour moi, il semble très bien, malgré l’agroéonomiste en moi qui dit, « J’ai besoin d’être payé plus pour mon blé ». Ce sera une longue histoire pour 2020.

Si on regarde en avant, vous connaissez la chanson. Nous avons besoin que la demande soit de retour et mettre de côté le Covid aiderait en ce sens. Cependant, la pandémie continue. Nous avons fait face à de faibles prix avant avec un juste retour du balancier ensuite. Les choses ont cette manière de s’arranger, même en temps de pandémie. Aussi tumultueuses que puissent être les choses, nous allons éventuellement retourner à la normale, même pour les prix des grains. Ce chemin inégal en est un nouveau, mais éventuellement, ça nous mènera à un meilleur endroit.


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