Nouvelles Philip Shaw

Dans la batteuse, mes réflexions se tournent vers les marchés

25 octobre 2019, Philip Shaw

La récolte est en cours pour moi dans le sud-ouest de l’Ontario. L’excellente météo avec de belles journées ensoleillées me permet de semer du blé et de récolter en même temps. C’est un peu un défi, surtout alors que je suis plus âgé, mais mon gros équipement m’aide avec ces excellentes conditions. Ce fut une longue année pour moi; j’adorerais avoir de l’excellente météo jusqu’à Noël.

Si nous pouvions seulement avoir une telle météo sur demande. La saison 2019 a eu sa dose de défis. La plupart des cultures dans le champ ne peuvent tolérer un gel. Plus tôt en octobre dans l’est de l’Ontario et certaines régions au Québec des températures sous zéro ont mis un terme au développement des cultures. C’est une autre raison pourquoi cette bonne météo à la récolte est appréciée. La plupart d’entres nous ont besoin d’encore quelques semaines sans gel.

Le 10 octobre dernier, le USDA a sonné de nouveau à la porte avec son dernier rapport mensuel d’offre et demande (WASDE), ajoutant un peu de plaisir à la récolte. Dans son rapport le USDA a estimé la récolte de maïs américain à 13,8 milliards de boisseaux, ce qui est en quelque sorte plus élevé que ce qui était prévu. Le USDA a estimé aussi la récolte de soya à 3,55 milliards de boisseaux avec un rendement de 46,9 bo./acre. Le rendement du maïs américain est estimé à 168,4 bo./acre. Malgré tous les problèmes rencontrés au printemps dernier, il semble que les chiffres de maïs américain seront parvenus à contrer l’adversité de la météo.

Les inventaires de fin d’année de maïs sont prévus à 1,93 milliard de boisseaux, ce qui demeure beaucoup, mais moins que la barre du 2 milliards. Le maïs a toujours des problèmes avec la demande et ça parait. Les inventaires de fin d’année de soya ont reculé à 460 millions de boisseaux, ce qui était dans le bas des estimations des marchés. Le USDA a abaissé le rendement du soya de 1 bo./acre à 46,9 bo./acre. Les acres récoltés ont été aussi réduits à 75,6 millions d’acres.

Le ratio inventaire/consommation du soya a chuté à 11% avec cette annonce, ce qui est généralement considéré assez positif (« bullish ») pour le soya. Bien sûr l’éléphant dans la pièce est toujours les discussions commerciales États-Unis et Chine qui sont en cours. Le président Trump a dit aujourd’hui que ces discussions se déroulaient bien. La Chine considère d’un autre côté que « court terme » veut dire 100 ans. Tout ceci aura été tellement un fruit défendu pour le marché du soya. Un jour, j’aimerais pouvoir dire que c’est terminé.

Le prix du maïs en Ontario est d’environ 5 $/bo.(197 $/tonne) pour le maïs et de 11,50 $/bo. (422,5 $/tonne) pour le soya. Les prix du maïs ont chuté d’environ 70 cents au cours des derniers mois, le soya a par contre gagné l’équivalent. Un dollar canadien à 75,22 cents US aujourd’hui aide. En fait, c’est ce qui aide les producteurs canadiens depuis déjà plusieurs années maintenant.
Alors que se passera-t-il ensuite? Hé bien, j’ai entendu d’un conseiller de confiance (mon voisin producteur) qui m’a dit que le soya avait la capacité de bouger d’un dollar, mais il ne savait pas si ce serait à la hausse ou à la baisse. Je la trouve bien bonne. Cependant, si le Brésil reste sec ou rencontre tout problème de production, tous les paris sont ouverts. Pas besoin de le rappeler, personne ne sait.

En Ontario et au Québec, les producteurs sont des vendeurs de prix « flat ». Pour plusieurs années, j’ai évité cette notion alors que je pensais que les opportunités dans les bases et le marché à la bourse étaient deux choses différentes. Cependant, de plus en plus, avec la forte volatilité du dollar canadien, les producteurs sont devenus plus confortables avec du maïs à 5 $/bo. et du soya à 12 $/bo. peut importe ce que font les bases et le marché à la bourse.

Un jour, il y a bien des chances que ça change encore. Par exemple, il y a 7 ans, le dollar canadien était plus élevé que le dollar américain. Depuis, nous avons été dans une trajectoire constante à la baisse vers 75 cents, un niveau à partir duquel nous avons évolué au-dessus ou en dessous depuis 3 ans. Éventuellement, nous retournerons dans les 80 à 90 cents. Ceci va mettre de la pression sur les prix comptants des grains et par défaut, la mentalité de vendre à « prix flat ».

Alors que les jours se suivent, nous aurons à voir comment les marchés des grains en Ontario et au Québec prendront forme comme cet automne. Est-ce que le gel plus tôt en octobre occasionnera des problèmes généralisés de qualité dans le maïs dans l’est de l’Ontario? Est-ce que le gel affectera d’autres régions qui n’ont pas été touchées la semaine dernière? Est-ce que le gel du 15 octobre résultera en une base décevante cet automne? Ou est-ce que ce sera une année normale, avec trop de maïs en Ontario qui érodera la base un peu plus? Jusqu’à présent, il est trop tôt pour le dire.

Bien sûr à ce stade-ci nous n’avons pas les réponses à la plupart de ces questions. Idem pour les marchés boursiers des grains, qui ne font généralement pas de prisonniers. La clé bien sûr est l’intelligence quotidienne de marché. Ceci veut dire surveiller les prix tous les jours, regarder votre terminal DTN souvent et parfois même jetez un coup d’œil de temps en temps sur Twitter.

Je serai de retour demain dans ma batteuse. J’espère encore plus de soleil et de prix élevés. Y arriver est certainement une aventure.


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