Nouvelles Philip Shaw

Information quotidienne sur les marchés : la stratégie la plus adaptée

15 février 2021, Philip Shaw

L'une des plus importantes décisions que je prends au printemps est de décider quand mes sols sont « prêts ». C'est ce que font tous les producteurs. Chaque année, dans le profond sud-ouest de l'Ontario, nous prenons cette décision en avril et en mai, lorsque nous sortons notre première machine dans le champ. 

Bien sûr, l’expression « prêt » peut avoir des significations différentes selon les régions. Prenons par exemple les différences entre mes champs dans le sud-ouest de l'Ontario et ceux de l'agriculteur du centre de l'Alberta qui se prépare à planter son canola. Sont-ils différents?  Bien sûr que oui, mon sol est différent et ma situation aussi. 

Il existe des règles générales. Par exemple, certaines personnes prennent une pelle et voient si le sol s'effrite ou elles travaillent un peu de terre et cherchent la même chose. Si le sol se tasse, il n'est pas bon, s'il s'effrite, on peut y aller. Il y a beaucoup de choses entre les deux. Cela me rappelle mes règles de commercialisation.  Au fil des ans, ces règles sont devenues beaucoup plus changeantes. En fait, certaines de ces règles empiriques ont été abandonnées. Par exemple, à l'époque où le maïs atteignait 4 dollars le boisseau, ma règle empirique disait « vendre ». Il va sans dire que cette règle a disparu.  J'ai besoin de nouvelles règles empiriques. Nos marchés des grains 2020/2021 ont simplement évolué. 

La semaine dernière, l'USDA a publié la dernière version de son rapport WASDE. L'USDA a réduit de 50 millions de boisseaux les stocks de maïs de fin d’année pour 2020/21, les ramenant à 1,502 milliard de boisseaux, ce qui est bien plus que ce que les analystes avaient prévu. Ils ont maintenu le rendement à 172 boisseaux par acre et la production à 14,182 milliards de boisseaux. L'utilisation totale a été augmentée à 41,625 milliards de boisseaux, ce qui porte le ratio stocks de maïs / utilisation à 10,2 %. L'USDA a augmenté les importations de maïs de la Chine de 6,5 millions de tonnes.  

Le soya a été traité un peu différemment, les stocks de fin d’année ont été réduits à 120 millions de boisseaux. L'USDA a augmenté l'estimation des exportations de 20 millions de boisseaux, la faisant passer à 2,250 milliards de boisseaux. L'estimation des importations de la Chine est restée la même, à 100 MMT.  En substance, le nombre de stocks de fin d’année de soya, contrairement à celui du maïs, était dans les limites des anticipations des marchés et n'a pas créé de surprise. Le jour de la publication, le maïs était en baisse, le soya était en hausse, suivi par d'autres prix à la baisse mercredi. Avec le début de l'offre nouvelle récolte du Brésil, nous allons voir comment la Chine oriente son approvisionnement.

Il est intéressant de voir l’évolution de la situation à mesure que nous avançons dans le mois de février. Dans les prochaines semaines, nous allons également recevoir des indications sur le nombre d'acres prévu par l'USDA pour la prochaine saison ; cette estimation sera définitivement confirmée le 31 mars lorsque nous recevrons les estimations officielles de l'USDA sur les ensemencements américains et la manière dont l'offre évoluera cette année en fonction des acres prévus. Cela signifiera certainement une augmentation des acres et une augmentation de l'offre de maïs et de soya. Cependant, le plus dur sera d'y parvenir.  Les cultures doivent pousser et mûrir pour arriver à la ligne d'arrivée. Personne ne connaît les obstacles qui se dresseront sur la route. En 2020, très peu d'agriculteurs avaient anticipé l’évolution des prix.

Cela me ramène aux règles empiriques du sol « prêt ». En 2021, quelles devront être nos règles empiriques dans le monde du commerce des grains ?  En Ontario et au Québec, devons-nous vendre le maïs à 5 dollars (200 dollars la tonne dans l'est de l'Ontario et au Québec) ou devons-nous recalibrer ce prix en fonction de la conjoncture. Par exemple, au cours des cinq dernières années, les agriculteurs de l'Ontario et du Québec sont devenus des vendeurs de grains à « prix fixe », car nous sommes toujours aux prises avec la volatilité du dollar canadien et des contrats à terme sur les grains. Cela ne nous a pas rendu service en 2020, car les prix fixes ont chuté dans le temps, pour une livraison plus tard, alors que les prix « spots » du maïs et du soya sortaient de leur fourchette habituelle.  Le paradigme des prix fixes en Ontario et au Québec a-t-il disparu ? Sa durée de vie a-t-elle diminué ? Quelles règles empiriques devrions-nous suivre en 2021 et 2022 dans notre univers concurrentiel ? 

Devons-nous vendre le maïs à 6 dollars et le soya à 13 dollars ? Est-ce que ce sont les nouvelles règles empiriques ? Ou est-ce que ces mêmes règles empiriques sont un obstacle, un vieux souvenir, dont certains d'entre nous sont prisonniers ? Les règles empiriques en matière de gestion agricole changent-elles notre orientation au fil du temps, à mesure que le monde évolue ? Ou suis-je le seul à être concerné par ces paradigmes ? À l'ère moderne de 2021, avec un smart phone dans la poche, l'information commerciale quotidienne l'emporte-t-elle sur ces règles empiriques ?  Le sol est-il « prêt » ou non ?

Je le sais par expérience. Je cultive beaucoup de terre argileuse lourde. Mais parfois, rien n'est parfait comme en 2019, quand le sol n'était pas prêt. D'après mon expérience, personne ne commercialise jamais sa récolte au sommet du marché, ce qui est toujours évident après coup. Personne ne le sait, mais vous pouvez vous plonger dans les facteurs du marché, ce que j'appelle « l'intelligence quotidienne du marché ». En d'autres termes, recherchez des informations crédibles sur le marché, essayez de comprendre les marchés à terme et au comptant sur une base quotidienne. Cela vous aidera à prendre de bonnes décisions en matière de commercialisation. En fin de compte, cela pourrait même vous permettre d'établir de bonnes « règles empiriques » pour la commercialisation de vos grains. 

 


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