Nouvelles Philip Shaw

Pas d’or dans la mine? Bah, avec le bitcoin, continuez de forer.

20 décembre 2017, Philip Shaw

Au cours des 32 années pendant lesquelles j’ai écrit des chroniques, j’ai eu le temps de couvrir de nombreux sujets. Les choses sont tellement différentes aujourd’hui, en 2017, comparativement à ce qu’elles étaient en 1986 quand j’ai commencé à écrire. Ce qui était considéré comme important à l’époque ne fait plus partie des préoccupations actuelles et, avec les années qui se sont écoulées, le changement a été exponentiel. L’agriculture se pratiquait avant l’arrivée d’internet. En 2017, je suis convaincu que c’est difficile à croire pour les plus jeunes.

Bien entendu, il y a eu quelques constantes au fil des années, et l’une d’entre elles, c’est l’argent. À mes débuts, le coût de l’argent était élevé; le taux d’emprunt était de plus de 23 %. Aujourd’hui, c’est tout le contraire au Canada. L’argent bon marché est la cocaïne du monde de l’investissement et ce n’est pas différent dans le milieu agricole canadien. Nous savons tous ce qui s’est passé avec le prix des terres agricoles au Canada ces dix dernières années.

J’ai souvent dit que la réalité des taux d’intérêt excessivement bas a créé un environnement que je trouve difficile à comprendre. Par exemple, j’ai écrit au sujet des taux d’intérêt qui descendent au point qu’ils pourraient devenir négatifs comme c’est le cas dans certains pays scandinaves. J’ai écrit à propos de l’argent qui est versé dans des immobilisations en vue de gains en capital plutôt que dans un investissement plus facile.

C’est un environnement que j’ai toujours considéré comme un peu fou comparativement aux jours passés où je payais mes terres agricoles avec des taux d’intérêt beaucoup plus élevés. Toutefois, ce n’est pas encore assez fou pour certaines personnes. Il y a maintenant le monde de la monnaie numérique, ou cryptomonnaie, dont la plus populaire est le bitcoin. Le phénomène a pris d’assaut les pages d’investissement dernièrement. C’est la folie de notre temps, ou du moins ces derniers mois.

Je ne me lancerai pas dans une longue explication au sujet de la cryptomonnaie et du bitcoin et des mines de bitcoin. Je dirai simplement que ce n’est pas nouveau pour moi puisque j’ai suivi l’évolution du phénomène au cours des quelques dernières années. Au départ, les éléments criminels utilisaient la cryptomonnaie dans de nombreux pays étrangers. En résumé, il s’agit d’une monnaie numérique décentralisée qui fonctionne sans administrateur central. Elle repose sur la technologie des chaînes de blocs, qui a de nombreuses autres applications dans de nombreux autres domaines. On parle de mines de bitcoins. Alors je dis « continuez de forer ». Êtes-vous désorienté? Vous vous souvenez du temps où les Obligations d’épargne du Canada vous donnaient un retour de 19,5 % pour une année? Aujourd’hui, nous minons des bitcoins!

Facile de dire le monde est normal ou le monde est devenu fou. C’était le titre d’une autre de mes chroniques récentes, et je n’y faisais même pas mention du bitcoin. Par contre, à un moment donné aujourd’hui, un seul bitcoin était évalué à 19 300 $ US. Il offrait un retour en 2017 d’au moins 1600 %. Évidemment, certaines personnes disent qu’il montera à 40 000 $ d’ici la fin de 2018. Et d’autres affirment que c’est la chose la plus ridicule depuis les "Pets rock" (roches de compagnie). Il va sans dire que c’est réel et qu’il est possible que ça représente une partie de notre avenir. Vous pouvez d’ailleurs être certain que l’Agence de revenu du Canada s’y intéresse.

Il faut prendre le temps de s’informer de l’histoire du bitcoin. C’est sombre. Il s’agissait de la source préférée de paiement d’éléments criminels à travers le monde dès son apparition. Les choses ont assurément évolué, au point maintenant où certaines personnes critiquent la quantité d’énergie nécessaire pour miner un seul bitcoin. Clairement, je crois que c’est très complexe, mais tout de même très réel en 2017.

Je ne sais pas de quelle manière tout cela va se terminer. De bien des façons, je pense que la folie des bitcoins est le résultat des taux d’intérêt excessivement bas, qui dominent le paysage depuis dix ans. L’élément criminel s’est lancé sur le bitcoin initialement pour faciliter les transactions. La folie la plus récente consiste à obtenir des retours extrêmement gonflés sur de l’argent réel.

Bien entendu, la plupart des agriculteurs ne sont pas impliqués avec un élément criminel, même s’ils ont l’impression de se faire voler en recevant 4 $ le boisseau en argent réel pour du maïs cultivé en 2017. Cependant, comme la Banque du Canada maintient ses bas taux d’intérêt encore cette semaine, ce n’est peut-être qu’une question de temps avant qu’un vendeur agricole entrepreneurial commence un échange de bitcoins. L’argent réel est devenu si bon marché que les retours des bitcoins peuvent être alléchants.

Cette semaine, de nombreux agriculteurs m’ont dit que le bitcoin leur rappelle l’histoire de Bre-X, un cas de fraude célèbre d’une mine d’or canadienne. De nombreux Canadiens y ont perdu leur chemise. Je leur ai répondu que ce n’était pas tout à fait la même chose. Dans le cas de Bre-X, il s’est avéré qu’il n’y avait pas d’or dans la mine. Le géologue en chef de Bre-X aurait sauté d’un hélicoptère en vol lorsque la vérité a éclaté. Avec le bitcoin, je dis « continuez de forer ». Vous verrez.


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