Nouvelles Philip Shaw

La sécheresse en Ontario laisse planer un doute sur la suite

14 juillet 2016, Philip Shaw

Ce n’est pas un secret : une sécheresse sévit en Ontario. Jetez un œil sur n’importe quelle carte météo et vous constaterez à quel point le printemps et l’été jusqu’à maintenant ont été secs. La situation est semblable au Michigan; les stations de télévision de Détroit rapportent que les cultures sont stressées et endommagées en ce début de deuxième semaine de juillet. Pendant ce temps, d’importantes précipitations ont inondé la majeure partie de la Corn Belt aux États-Unis. Peut-être que, cette année, c’est à notre tour de se passer de pluie. Croisons-nous les doigts pour que cela change au cours de la prochaine semaine.

Dans un contexte de sécheresse, un seul épisode de pluie peut habituellement tout changer. Je pense que l’Ontario en est là à la suite de plusieurs semaines de rares pluies et de températures chaudes. J’ai vécu 1988, qui a toujours servi de référence pour les sécheresses en Amérique du Nord. Ce que je me rappelle de cette année, c’est la chaleur – avec des journées à 37 °C – et l’absence de pluie jusqu’au 16 juillet, jour où 50 mm de pluie sont venus mettre fin à la sécheresse. Jusqu’à maintenant en 2016, nous sommes loin de ça. Mais il va sans dire que les médias, en Ontario comme au Michigan, se sont emparés de l’histoire. Tout le monde veut de la pluie.

À l’heure actuelle, les cultures américaines de maïs en sont à environ 15 % de l’apparition des soies et le reste devrait se produire au cours des prochaines semaines. Des précipitations sont prévues pour ces régions et le marché en a tenu compte puisque les prix ont chuté d’environ 0,60-0,70 $/boisseau dans les dernières semaines. Il s’agit peut-être d’une pression supplémentaire étant donné que si la ligne de tendance des rendements monte des 168 boisseaux/acre actuellement prévus par le USDA à, disons, 171 boisseaux/acre, la récolte pourrait être d’un peu moins de 15 milliards de boisseaux. On se croirait en plein roman de science-fiction avec une telle production. Mais je ne veux pas m’aventurer là. Les cultures ontariennes flétrissent en raison du stress subi et c’est toujours très difficile lorsque les grandes régions productrices font belle figure et que les prix chutent dramatiquement. Et si l’on regarde le dernier mois, on est en plein là-dedans.

En date du 5 juillet, selon le site Web Guetter la sécheresse d’Agriculture et Agroalimentaire Canada, des conditions de sécheresse extrême s’étendent de la vallée de l’Outaouais à la péninsule du Niagara, longeant les rives du lac Érié jusqu’à Windsor, puis vers le nord à travers le parc Algonquin jusqu’aux rives de la baie Georgienne et remontant jusqu’à North Bay. Bien entendu, où je suis situé, à Dresden, en Ontario, je suis en plein dans cette bande. Dans cette portion de l’est de l’Ontario et des rives nord du lac Ontario central, la sécheresse atteint des records. Des dommages irréversibles ont déjà été causés aux cultures et des précipitations sur l’ensemble de la région au cours de la prochaine semaine seront nécessaires pour empêcher que ça s’empire.

L’économie agricole en ce qui a trait à une pareille situation est très claire. Si la sécheresse se poursuit, il y aura des demandes généralisées d’indemnisation dans le cadre de l’assurance-récolte à la fin de l’année ainsi qu’un gros coup au PNB de l’Ontario. Selon l’étendue de la sécheresse au cours des six prochaines semaines, on pourrait se retrouver dans une situation d’importation de maïs en 2017 comme on n’en a pas vu depuis de nombreuses années. On pourrait devoir importer en Ontario du maïs des États-Unis et du Québec. Il est encore trop tôt pour affirmer que ce sera le cas, mais ce n’est pas tout le monde dans l’est du Canada qui se rappelle que ça ait déjà été le cas. Nous n’avons pas toujours eu des récoltes records de maïs en Ontario comme c’est arrivé dans les cinq dernières années. Je souhaite voir un revirement de situation miraculeux, mais si ça ne se produit pas, le maïs affluera vers l’Ontario sans en sortir nécessairement.

Toutefois, la récolte de blé en Ontario débute véritablement dans le sud-ouest. Bonne nouvelle, les rendements sont bons et la qualité est très bonne. Si vous cultivez du blé dans l’est du Canada, vous savez que ce n’est pas toujours évident. J’ai l’intention de récolter la semaine prochaine et j’espère que le plus beau blé que j’aie jamais cultivé soit également le plus abondant. Le blé est la culture la plus risquée. Cependant, on peut espérer que le blé produit ici en Ontario dans ces conditions sèches marquera les mémoires. Au moins, ça mettrait un baume sur les plaies causées par la sécheresse pour bon nombre d’entre nous.

Si l’on doit retenir quelque chose de 2016, c’est que les années se suivent, mais ne se ressemblent pas en agriculture. C’est encore plus frappant étant donné que, l’année dernière, j’avais subi d’importants dommages sur quelques-unes de mes fermes en raison des pluies abondantes au printemps. J’avais terminé de resemer le soja le 29 juin. Cette année, on se croirait dans le désert; on va travailler et, tous les jours, c’est beau et chaud. Je ne regarde même plus les prévisions météo. Je n’ai besoin que d’une chose. Je sais que la pluie finira par arriver. Parce que, même en 1988, la pluie a fini par arriver.


 

 

 


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